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14 décembre 2018

GAFAM et bactéries

Une histoire créée par Nathalie Servan
lors de l’atelier «Uto et Dysto vont en bateau – Rêves et cauchemars numériques»
24 novembre 2018, Bibliothèque de la Cité, Genève

Quelle est notre identité à nous les humains ?
Il paraît que nous avons plus de bactéries dans le corps que de cellules humaines. Serions-nous véhicules à bactéries, serions-nous utilisés par celles-ci ? Qui sont-elles, d’où viennent-elles, que nous veulent-elles ?
Il paraît même qu’elles peuvent prendre le contrôle des cerveaux afin de les faire agir à leur guise. Avez-vous entendu parler des bactéries qui colonisent le cerveau des fourmis lesquelles n’ont alors qu’une option, celle de monter le long des herbes pour se figer à leur sommet ? Ensuite ? Ensuite, un mouton passant, les fourmis sont dégluties et les bactéries hébergées pour se reproduire dans les intestins du mouton. Bref, elles occupent les cerveaux et les corps des mammifères à des fins ! Elles sont intelligence.
Qui vous dit qu’elles n’œuvrent pas déjà, voire depuis toujours, par le biais de l’humanité, ente autres ? Qui vous dit que l’histoire avec un grand H ne serait pas la leur ?
C’est ce que se dit Nathalie, ce matin, en observant ses concitoyens dans le bus. Ces concitoyens qui lui semblent avoir perdu le contrôle de leur cerveau. Ces concitoyens qui glissent presque tous, de plus en plus, vers une externalisation volontaire de leur cerveau. C’est comme si elle les voyait attachés par un cordon-nourricié à un cerveau-objet : cette machine qu’ils tiennent entre les mains fait tout ou presque pour eux ; elle voit pour eux, elle sait pour eux, elle parle pour eux, elle traduit pour eux, elle pense pour eux, elle chante pour eux…et eux…ils se vident. Ils se vident de leurs potentiels. Ils se vident et se remplissent par cette machine. C’est comme si l’intérieur de ses concitoyens n’était plus qu’un réceptacle.
Que se passerait-il, se demanda soudain Nathalie, si ces gens dans le bus, brusquement n’étaient plus alimentés par leur machine parce qu’elle-même déconnectée de sa source. Cette source qui voit, qui sait, qui parle, qui traduit, qui pense, qui chante. Cette source ?! Quelle source ?
Qui alimente la machine ? Qui vous dit que les créateurs des GAFAM et compagnie ne sont pas eux-mêmes pilotés par les bactéries ?
Et si nous stoppions la dépendance à cette source extérieure en nous débranchant. Et si nous opérions un retournement intérieur. Et si nous partions, en voyage de découverte intérieure, à l’aventure. Qui vous dit qu’il n’est pas question pour nous de découvrir que nous sommes colonisés depuis toujours.
Et si ces colons étaient en train d’inspirer Nathalie afin qu’une rencontre ait lieu. Un rendez-vous à l’intérieur, un face-à-face avec les bactéries, les connaître de l’intérieur, dialoguer avec elles, apprendre leur langage et qui sait, œuvrer ensuite ensemble, en toute conscience, à une autre histoire avec un grand H. Une Histoire où il ne serait plus question que l’humanité soit esclave d’une main invisible.
Une main invisible qui pour le moment, qui sait, se sert des GAFAM et compagnie pour nous piloter de l’extérieur.